"Il faut cultiver notre jardin"

mardi 3 octobre 2017

Point Cardinal

C'est tant l'énigme du titre que la sobriété de la couverture et, bien sûr, le nom de l'auteur - Léonor de Recondo - qui m'ont attirée vers ce roman de la rentre littéraire. 
Sur un parking, tard le soir, dans une voiture, Mathilda se démaquille consciencieusement en fredonnant un air de Melody Gardot et enlève toute trace de la soirée qu'elle vient de passer au Zanzibar avec ses amies. Démaquillage puis déshabillage, et, sous la robe de soie et la lingerie fine, c'est peu à peu Laurent qui réapparaît. Car oui, Laurent, au lieu de fréquenter la salle de sport, passe une fois par semaine la soirée avec Cynthia et les autres, se sent bien parmi ses soeurs d'aventure. Puis, sagement il rentre chez lui et retrouve sa chère épouse, Solange, et leurs deux ados. Vient un moment où le mensonge finit par l'étouffer : Laurent décide alors de ne plus se censurer et de révéler la vérité, sa vérité, la plus profonde, la plus intime, celle qu'il ne veut plus dissimuler. 
S'il a fondu et perdu du poids, si sa silhouette s'est affinée ce n'est pas par coquetterie virile, c'est pour faire apparaître physiquement la femme qu'il est au plus profond de lui. Son entraînement intense en vélo lui permet d'affiner tout son corps, de galber ses jambes et ses cuisses, d'allonger ses muscles.
Et l'annonce fait l'effet d'une bombe ! elle bouleverse l'équilibre familial, l'édifice conjugal, la situation sociale. Au début, il a essayé d'évacuer cette envie de transformation comme si c'était une névrose, un coup de folie, voire une maladie. Sa rencontre avec un psy borné lui permet, en fait, de mieux comprendre encore ce qu'il veut. Et Laurent ne faiblit pas : il s'affirme et franchit vaillamment toutes les étapes même si elles l'éloignent de ceux qui l'aiment/qu'il aime. 
Léonor de Recondo nous raconte avec finesse et pudeur, mais aussi avec sensibilité et sensualité cette aventure qui est plus que corporelle : véritable odyssée personnelle et familiale, l'histoire de Laurent/Lauren interroge notre rapport au genre, mais aussi les questions de l'identité, de l'intimité. On se sent parfois bousculé, interrogé dans ses valeurs et convictions, on prend conscience de ce que l'on pense être capable d'accepter.
Un roman à lire !

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